Tables des matières
La Zone du Dehors est un roman d’anticipation d’Alain Damasio. J’ai connu cet auteur il y a quelques années lorsqu’on m’a offert son autre livre, la Horde du Contrevent (fantasy) ; il est rare de trouver un livre avec une telle force, une telle majesté que l’on ne peut plus se décrocher de la lecture, pendant laquelle on sent son âme se retourner. Damasio possède un style très particulier, plein de vie et incroyablement varié : dans ses œuvres plusieurs personnages font le narrateur tour à tour, et chacun possède son propre style (surtout dans la Horde). Le récit ne s’essouffle jamais et se trouve parsemé de réflexions philosophiques. La Zone du Dehors s’inscrit dans la lignée de 1984 et du Meilleur des mondes, présentant au lecteur une société si démocratique que toute nuance et toute vie s’est effacée.
Le contexte
Après la Quatrième Guerre Mondiale, la Terre est dévastée ; des colons ont quitté la Terre pour s’installer sur un satellite de Saturne pour y fonder Cerclon I, une société démocratique fondée entièrement sur les principes du capitalisme poussés à leurs extrêmes. En effet, tous les deux ans chaque citoyen doit noter ses collègues, sa famille, ses amis, etc. afin que soit attribué un rang à chacun – ce système s’appelle le Clastre. À ce rang est attaché un nom (donné par la suite de lettre permettant d’obtenir ce numéro : A pour le premier – le président, BA pour le 53è, etc.), et donc toute personne qui est promue doit changer de nom ; l’être humain est devenu parfaitement interchangeable et n’a de valeur que par sa performance.
La majeure partie de la vie est basée sur la consommation (d’objets inutiles, évidemment) et il est impossible de trouver un lieu public sans publicités, que ce soit sous forme de bande sonore, de film ou de personnes qui viennent discuter avec les passants.
Les déplacements sont surveillés en permanence, de même que les horaires de travail et de loisir. Chaque citoyen possède un fichier informatique qui contient toutes les informations sur lui, depuis ses habitudes jusqu’à son profil psychologique, en passant par ses relations.
L’art, la philosophie et tout ce qui faisait vibrer l’âme humaine est mort ; tout a été sacrifié au prix de l’uniformisation de la population. Les personnes ont oublié ce que c’était que d’être vraiment proches des autres, d’avoir de vrais amis.
En résumé, ce slogan : « Souriez vous êtes gérés. »
L’histoire
Le récit est centré principalement sur Captp, professeur de philosophie et dirigeant de la Volte, mouvement anarchique qui cherche à faire prendre conscience de l’absurdité du système. Nous assistons à une transformation du mouvement, qui abandonne les anciennes méthodes – discours et tracts – pour devenir plus virulent en voyant que la situation ne s’améliore pas.
Par exemple un nouveau type de produits, les biopuces, viennent d’être mis sur le marché : ils se greffent sur la moelle épinière et permettent à divers programmes d’agir directement sur le cerveau de la personne, par exemple pour lui faire ressentir plus profondément la musique, ou de l’ardeur amoureuse, etc. Captp comprend que, caché derrière ces nouveaux plaisirs, se cache un instrument de contrôle de premier ordre pour le gouvernement.
Nous assistons à de nombreux développements sur le pouvoir et le contrôle des masses, mais aussi sur la volonté et la liberté, sur la vie et sur l’exaltation. L’âme s’éveille et palpite lors de ces passages.
Conclusion
Ce livre est vraiment passionnant. Les réflexions philosophiques sont particulièrement intéressantes et bien menées, sans toutefois venir ralentir l’action. La vision proposée par la Volte est peut-être trop anarchiste, mais cela ne peut être pire qu’une société aussi aseptisée que celle décrite ici.